Ce vieux rêve qui bouge

Un film de Alain Guiraudie

 2000  France  Fiction  Prise de vue réelle  50 mn  Couleur  Mode de production : Cinéma  VF

 Scénario : Alain Guiraudie  Image : Emmanuel Soyer  Son : Dana Farzenhpour  Montage : Golonda Ramos  Musique originale : Berlioz

 Distribution artistique : Pierre Louis-Calixte, Jean-Marie Combelles, Jean Segani, Yves Dinse, Serge Ribes, Jean-Claude Montheil, Rui Fernandes, Jérôme Mancet, Laurent Lunetta.

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Dernière mise à jour : 18 juin 2012

Dans son second moyen métrage, Ce vieux rêve qui bouge, Alain Guiraudie abandonne les ounayes, les bandits d’escapade, les guerriers de poursuite de Du soleil pour les gueux et sa chère Obitanie imaginaire, pour l’univers - a priori - plus réaliste et plus cartésien d’une usine sur le point de fermer. Là, Jacques Roudillou, un jeune technicien est chargé de démonter une abracadabrante machine de tuyaux servant à fabriquer des redoubles de 10 mètres et nommée l’Ubitona ! De l’Obitanie à l’Ubitona, il n’y a finalement qu’une mince frontière. Les grands espaces de la Causse sont ici remplacés par l’espace non moins impressionnant d’une volumineuse usine éventrée, gigantesque carcasse en brique d’un monde ouvrier en perdition.

Autant Du soleil pour les gueux était un film d’extérieur et de lumière, autant Ce vieux rêve qui bouge est enterré, marqué de larges trouées de lumière mais où les corps et les visages se devinent plus qu’ils ne se montrent. Car il s’agit bien encore d’un film sentimental, mais dans lequel l’homosexualité prend cette fois-ci toute la place.

C’est la « prolo pride » dit Guiraudie (dans un débat figurant dans les bonus du dvd). Dans cet univers métallurgique hautement viril, l’homosexualité y est un sujet tabou et toute l’adresse de Guiraudie est de lentement nous amener à comprendre les enjeux sentimentaux qui se trament entre trois hommes: le jeune Jacques, le vieux Louis et Jean, le contremaître. Tous trois vont se tourner autour, jouer de leurs regards insistants, parler à demi-mots de leurs émois inavouables dans une parade amoureuse rythmée par le démontage de l’Ubitona. Les larges tuyaux de cette machine diabolique en deviennent rapidement phalliques et seront même le prétexte pour se toucher subrepticement. Guiraudie filme la passion (non-réciproque) entre ces trois hommes mais dont on ne verra finalement que la partie immergée.

« Est-ce qu’on peut encore bander après la fermeture d’une usine ? » résume très bien le directeur du cinéma du Polygone qui reçoit Guiraudie […]; telle est la question centrale du film d’un point de vue plus sociologique car n’oublions pas que le cinéma de Guiraudie a toujours eu une dimension militante. Cette fois-ci, il interroge le sens du travail. Y-a-t-il une vie pendant et après le travail ? Vraie question qu’un spectateur trouvera déplacée. Guiraudie filme une classe ouvrière oisive, qui prend du plaisir, joue à la belote, boit des pots, mais non sans une certaine mélancolie et amertume. Comment remplir sa vie autrement qu’avec le travail ? Comment faire quand on n’a jamais fait autrement ? Une autre société est-elle possible ? La revoilà la question du possible et de l’utopie si chère au cinéma de Guiraudie.

Laurent Devanne

(Source : www.arkepix.com)

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