Photographie d’un camp, Le Vernet d’Ariège

Un jour de mai 1993, Linda Ferrer-Roca se voit confier par « une amie d’amis », de vieilles caisses trouvées dans un grenier de sa maison familiale. « Les boîtes contenaient des petits boites en carton abritant des négatifs sur plaque de verre, format 9x12 ». Sa curiosité de photographe la pousse à les développer : les photographies représentent des hommes et forment, par leur ensemble construit sur le même schéma face et profil, un fichier anthropométrique. Parmi ces clichés se sont glissées d’autres photographies, des sujets « de la vie » qui prouvent que le photographe avait profité de ce qui apparaît comme un projet institutionnel pour faire ses propres photos. Linda Ferrer-Roca découvre alors qu’elle se trouve en possession des fichiers du camp du Vernet, un camp construit en 1939 pour les réfugiés espagnols et qui devait se transformer jusqu’en 1944 en camp d’internement pour les anti-fascistes étrangers et camp de transit pour les juifs.

Linda prend contact avec d’anciens prisonniers du Vernet, aujourd’hui dispersés entre la France, l’Espagne et la Slovénie, et fait revivre, à travers leurs témoignages et sans jamais s’éloigner des photographies, la mémoire du camp du Vernet. C’est ici, le témoignage d’un polonais né en Allemagne interné pour activités trotskistes ; là, celui d’un ancien combattant de la guerre d’Espagne, réfugié en France après la bataille de Catalogne en 1939… Les témoins peu à peu retracent la vie dans le camp, la faim, la proximité, le travail mais aussi les amours et les évasions. Mais ce que Linda recherche également à travers un examen détaillé et passionnant des photographies – agrandissement d’un reflet dans un verre de lunettes, analyse de la photo d’une jeune femme et de son enfant… – c’est le photographe qui a pris les clichés. Son enquête minutieuse finira par lui révéler l’identité de l’homme…