Juste justice ? La note d’intention
Par Michelle Cotinaud, Françoise Dahmane et Sylvie Dreyfus-Alphandéry, programmatrices des Rencontres cinéma et société
Le cinéma, dès sa naissance, s’est emparé du thème de la justice à travers des films documentaires comme des films de fiction. Du procès d’Alfred Dreyfus, réalisé en 1899 par Georges Méliès, fervent Dreyfusard, au film Une intime conviction d’Antoine Raimbault récemment sorti sur nos écrans.
Mais, la justice est-elle juste ? Telle est la question qui a guidé la programmation de ces rencontres cinéma et société 2019.
Deux grands axes ont structuré nos choix. Le premier interroge le fonctionnement de notre système judiciaire : est-il réellement indépendant ? Quelle que soit son origine sociale, chacun a-t-il les mêmes moyens pour se défendre, comme le voudrait un fonctionnement vraiment démocratique de nos institutions ? La justice ne s’exerce-t-elle pas comme une justice de classe, plus punitive pour les plus fragiles ? A ces questions fondamentales s’ajoute celle du fonctionnement judiciaire proprement dit avec les erreurs qui découlent souvent, faut-il le rappeler, des constats précédents.
Nous avons également tenu à évoquer le combat contre la peine de mort, sachant que son abolition peut sans cesse être remise en cause en France, et que ce combat se poursuit dans de nombreux pays.
Malgré tout, la lutte pour une Justice juste continue à se frayer un chemin. Elle se poursuit aujourd’hui partout dans le monde et les grands procès qui mettent en scène le droit international font entendre le désir de justice de sociétés entières. Le cinéma commence à témoigner de la lutte des peuples contre le FMI et permet de comprendre le fonctionnement du Tribunal Pénal International.
Le second axe de la programmation s’intéresse au système carcéral car la prison demeure souvent la seule réponse apportée aux dysfonctionnements individuels. Ne faut-il pas s’en inquiéter ?
On sait depuis longtemps, à travers les grandes révoltes du siècle précédent soutenues par des intellectuels comme Michel Foucault, que les conditions carcérales restent humainement indignes. Pourtant, des expériences montrent que des alternatives sont possibles.
C’est de tout cela dont il sera question autour de rencontres avec des réalisateurs et des professionnels de la Justice. Comme le dit Christiane Taubira : « S’il y a une mission régalienne sur laquelle on ne peut pas se permettre une indigence de pensée et de conception, c’est bien la justice. La justice est l’épine dorsale de la démocratie. C’est une mission qui doit rassurer, apaiser l’ensemble de la société ».
Est-ce la réalité aujourd’hui ? L’indépendance de la justice n’est-elle pas menacée ? En effet, depuis les années 1990, de nombreux textes visent des populations cibles au nom du risque zéro, renforcent le pouvoir arbitraire de la police et affaiblissent le droit de la défense.
Au plaisir de vous retrouver lors de ces Rencontres cinéma et société.