Visite (La) - Le Théâtre national de Chaillot
Un film de Allessanda Celesia
• 2015 • France • Documentaire • Prise de vue réelle • 15 mn • Couleur • Mode de production : Cinéma • VF
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Dernière mise à jour : 14 février 2022
Adrien vient « d’ailleurs ». C’est un prince aux mouvements délicats qui découvre le théâtre National de Chaillot de ses yeux éternellement émerveillés.
« Je suis tombée amoureuse du théâtre dans les coulisses. J’attendais mon tour pendant un spectacle de fin d’année de mon école de danse de province. J’ai attendu pendant longtemps puisque mon moment de danse sur scène a été très court : j’ai passé 2 heures en coulisses et 3 minutes sur scène ! Je n’ai pas été déçue, la magie du spectacle était là, dans la lumière qui filtrait de la scène, dans les penderies remplies de poussière, dans les vestiaires envahis de danseuses qui se précipitaient pour se changer, autours des techniciens qui s’affairaient pour faire pivoter le décor… J’ai vu le meilleur spectacle de ma vie ce soir-là : pour aimer le théâtre il faut pouvoir être partout à la fois, là où ça se passe et là où l’on croit que ça ne se passe pas.
Dans ‘La Visite’, j’ai souhaité que le protagoniste, Adrien, un jeune autiste de 19 ans, puisse investir ces espaces secrets qui restent dans les coulisses de l’action : la loge de maquillage, l’atelier des costumes, la machinerie, la console des lumières, du son…
Adrien vient d’‘ailleurs’. C’est un prince aux mouvements délicats qui observe le monde de ses yeux éternellement émerveillés. Il bouge en décalage avec le rythme de notre vie. Sa démarche paraît suspendue, comme s’il effleurait la surface du sol. Son toucher est léger comme les ailes d’un papillon, ses doigts parcourent les surfaces des objets qui l’intéressent comme si elles pouvaient en scanner des informations essentielles qui nous échappent à nous, le commun des mortels. Chez lui le sourire est une rareté qui crève l’écran au moment où il éclate. Et comme il a décidé de ne jamais parler « en public », en dehors de l’espace rassurant de sa maison familiale, l’univers qu’il porte avec lui est d’un silence inhabituel.
Les personnes rencontrées par Adrien dans les coulisses du Théâtre National ont su s’adapter à son rythme et l’accompagner dans cette découverte du ‘ventre de Chaillot’. La curiosité intarissable d’Adrien a guidé son exploration : il a emprunté les couloirs, ouvert toutes les portes, visité tous les recoins jusqu’aux sorties de secours qui mènent sur les toits, ou les dessous de la scène où il faut plier la tête pour ne pas se cogner…Nicole, la chef costumière, lui a confié son trousseau de clefs passepartout qui a fait de chaque porte une porte de l’imaginaire qu’on pouvait ouvrir à loisir. Adrien est différent et il perçoit l’invisible. Nous le suivons pour tenter de comprendre son secret.
Le rideau de fer se lève et Adrien est là, en plein milieu de la scène. Derrière lui un arbre est projeté : il perd ses fleurs mais les fleurs remontent vers le haut au lieu de tomber vers le bas. Adrien est seul dans cette immensité, sur cette scène dont l’imaginaire nous parle sans qu’on puisse le cerner. Puis, avec un parfait timing il sort de scène, pénètre les coulisses et démarre sa visite. Il fera la lessive avec la costumière, pénètrera les loges des artistes pour voler des bonbons et au passage danser le hip hop, étudiera avec beaucoup de sérieux le fonctionnement des cintres avec son ami Philippe qui connaît cette mécanique par cœur et n’en tarit pas d’éloges, montrera tout son sens de l’humour avec le chef accessoiriste qui a une série d’objets curieux à n’en plus finir, assistera au spectacle dont il finira par être le vrai protagoniste. La journée d’Adrien sera longue.
Le prince venu d’ailleurs finira par s’endormir sur un fauteuil oublié dans un recoin tranquille. Encore une fois impossible de dire s’il dort ou s’il médite sur la consistance des atomes de ce monde curieux qui est pour lui compliqué à déchiffrer. S’il vous paraît simple, c’est parce que nous sommes simplistes et que nous croyons avoir tout compris avant l’heure. Heureusement qu’Adrien nous rappelle que le visible n’est qu’une infime part de ce qu’il y a à percevoir, et que le lieu par excellence de l’invisible, le théâtre, est un terrain de jeu dont nous ne pouvons pas nous priver. »
Alessandra Celesia.
« La Visite » est une collection de courts métrages où dix auteurs et autrices cinéastes proposent chacun et chacune une rencontre avec des personnes en situation de handicap mental découvrant un établissement emblématique de la culture française.
Le film dans la Base cinéma & société
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