Marc Karlin

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Marc Karlin (1943-1999) fait partie de cette génération de cinéastes qui, après avoir vécu l’expérience militante des années soixante et soixante-dix, a développé une nouvelle pratique cinématographique dans les années quatre-vingt (les années de Margaret Thatcher et Ronald Reagan) en repensant la tradition marxiste pour la dépasser. Son activisme politique a pris la forme d’une approche radicale de l’esthétique documentaire et d’une tentative constante de construire une culture cinématographique alternative qui puisse s’opposer au système médiatique – il était rédacteur en chef et éditeur de la revue de cinéma indépendante Vertigo, créée en 1993. […]

Dès Nightcleaners Part 1 (1972-1975), réalisé en tant que membre du Berwick Street Film Collective, Karlin considère le cinéma comme un miroir du processus révolutionnaire : l’esthétique doit être aussi radicale que la politique. Dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, la création de Channel 4 fait de la télévision le lieu de nouvelles opportunités et de nouveaux défis. Karlin s’y fait une place sans compromettre sa vision politique, et réalise douze films. […]

Déçu par l’époque que traverse l’Europe, Karlin, qui est socialiste et internationaliste, s’intéresse d’emblée à la révolution au Nicaragua qui débute en 1979 avec la chute du régime de Somoza et décide de faire une série de films sur ce processus difficile. […] Les cinq films nicaraguayens ne sont pas efficaces en tant qu’outils politiques ou de propagande  ; ce ne sont pas non plus des manifestes idéologiques. Ce sont des formes de pensée subtiles à propos d’une lutte réelle et de personnes réelles.

La suite des recherches de Karlin sur le thème de la révolution est Utopias (1989), un essai mélancolique méditatif sur la crise de la gauche et l’héritage de cette dernière. […] Si Utopias traite du passé de la gauche, Between Times (1993) est une sorte de coda amère par laquelle Karlin cherche à imaginer l’avenir de la tradition révolutionnaire. […]

Quand Marc Karlin meurt en 1999, The Independent écrit qu’il «  était le cinéaste le plus important et le plus méconnu actif en Grande-Bretagne ces trois dernières décennies.  »

Federico Rossin, États génaraux du film documentaire, Lussas, 2015

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