Mammy water

Un film de Jean Rouch

 1956  France  Documentaire  Prise de vue réelle  18 min  Couleur  Mode de production : Cinéma

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Dernière mise à jour : 23 novembre 2016

Mammy Water est un petit film plein de grâce, qui dévoile le sens aigu de la narration qu’avait Jean Rouch. Une série de scénettes, qui auraient pu paraître disjointes, sont réunies en un récit simple et efficace. Comme souvent, Rouch joue de sa voix comme d’un instrument pour camper l’intrigue. Il plante d’abord le décor : carte d’Afrique, musique High Life (à la mode dans les années 1950 au Ghana), jeux de surf des enfants (les surf-boys, que Rouch traduit joliment par les garçons de l’écume), sauts périlleux et culbutes sur la plage ; châteaux forts de l’époque de la traite esclavagiste, scènes de pêche. Chez les pêcheurs fanti du Ghana, si la pêche n’est pas bonne, c’est qu’il y a une raison, et il faut y remédier par des rites appropriés. Or les pirogues rentrent vides, ainsi que les filets « éperviers » que l’on jette de la digue d’El Mina. La mer est fâchée. C’est qu’au village, les génies de la mer ont perdu leur prêtresse. On procède aux funérailles. Le corps de la prêtresse est exposé assis, comme une momie. Au milieu des instruments de musique traditionnels, une guitare européenne. On pleure la défunte : « Tu es partie, tu nous laisses tout seuls avec nos soucis. Qu’allons-nous faire ? » Le cercueil est placé sur un chariot, le cortège funèbre se met en route. Aucune pirogue ne prend la mer, jusqu’au festival du Roi de Chama. Trompettes, grosses caisses, emprunts aux fanfares coloniales. Le roi apparaît dans une chaise à porteur, abrité par un parasol. On aperçoit l’escalier du fort. Le cortège se dirige vers l’embouchure du fleuve Kra : le roi est « le petit roi de la mer » et on fait à l’océan des offrandes de bougies, de tabac, de manioc et de Gin. Comme les spectateurs sur le terrain, nous bénéficions de la mise en scène royale, notamment des régates traditionnelles, quand les voiles, même dérisoires, prennent une grâce d’oiseau, puis viennent chavirer juste devant le roi en signe d’hommage. La scène est remarquablement filmée et on se souvient de l’admiration de Rouch pour The Men of Aran, de Flaherty, qui avait su rendre la force physique des vagues. Le bœuf promis au sacrifice vagabonde sur la plage, mais il est promptement exécuté et dépecé. Tous les rites terminés, la pêche reprend. C’est le temps de Mammy Water, la divinité de la mer : splendides images de pirogues à voile, corps athlétiques, ardeur au travail. Vient la récompense : les filets sont pleins de poissons, provenant de bans entiers. Quelques thons de belle taille sont montrés à la caméra. Mammy Water se termine en boucle, par les garçons qui surfent à plat ventre sur une planche « Sea never dry ».

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