Eldridge Cleaver, Black Panther
Un film de William Klein
• 1969 • Algérie • Documentaire • Prise de vue réelle • 75 mn • Couleur • Mode de production : Cinéma • VOSTF (anglais)
• Scénario : William Klein • Image : William Klein
• Distribution artistique : Eldridge Cleaver
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Dernière mise à jour : 9 octobre 2012
Le film entend faire le portrait d’Eldridge Cleaver, le « Ministre de l’Information » du mouvement noir ultra-violent Black Panther. Présentement, Cleaver, recherché par la police américaine, est en exil à Alger. Là, il répond aux questions de l’interviewer du film. Il tient à préciser deux choses : d’abord que le Black Panther est un mouvement social et révolutionnaire et non un mouvement racial.
La preuve en est que les partisans du Black Panther ont fait souvent alliance avec les Blancs, désireux eux aussi de renverser le gouvernement capitaliste des U.S.A.
Le second point sur lequel insiste Cleaver est que la violence affichée du Parti Black Panther (qui a, par ailleurs, ses oeuvres de bienfaisance) est destinée, entre autres choses, à empêcher que le mouvement ne soit aussitôt « récupéré » par l’adversaire. On montre aussi Cleaver participant, en Afrique du Nord, à divers petits « sommets » noirs. Il déclare que la lutte contre le capitalisme américain n’est pas limitative, car, en tentant de détruire l’impérialisme américain, le Black Panther lutte contre l’impérialisme mondial dont l’Amérique est l’épine dorsale.
Malgré de longues tirades de Cleaver, ce n’est pas au niveau de l’idéologie que le film se révèle le plus efficace : ce qu’il nous découvre, c’est le portrait d’un révolutionnaire romantique, un poète hugolien de la cause des Noirs. L’exil donne au personnage d’Eldridge Cleaver une dimension lyrique.
« Mon problème a toujours été la façon dont le film est produit et distribué. J’ai toujours trouvé très anarchique la façon dont on fait les films en système capitaliste, surtout les films qui veulent être politiques, et je trouve inefficace un film politique produit en dehors d’un mouvement politique et distribué en dehors d’un parti politique. (…)
(Le film) a été élaboré en commun avec les Black Panthers (…) Il n’est pas concevable qu’il puisse en être autrement : je serais frustré de travailler isolément, de faire une sorte de déclaration personnelle par mon film et j’ai été content de travailler en collaboration avec un mouvement avec lequel je suis d’accord et d’être au service du B.P.P. Le film est une production algérienne. Il a été acheté par un distributeur américain et passe à New York dans un circuit commercial depuis le début Septembre avec grand succès malgré de nombreuses tracasseries policières visant à décourager le distributeur de poursuivre l’exploitation. Le thème des Black Panthers est si brûlant aux Etats Unis que la presse et la radio n’ont pas fait au film la publicité habituelle. Si un film est vraiment révolutionnaire, il se trouve devant un barrage, même dans le système américain où il n’y a aucune censure. D’ailleurs le film a pu passer à N.Y., qui est une ville libérale, mais il y a des indices qu’il ne pourra guère être projeté ailleurs car, s’il n’y a pas de censure, il y a des lois au sujet de ce qui peut troubler l’ordre public et beaucoup d’autorités locales pourront s’en servir pour interdire le film. C’est la preuve qu’à l’intérieur d’un système bourgeois un film véritablement révolutionnaire n’a pas la possibilité d’être librement distribué.
Je ne crois pas qu’il y ait d’opposition entre la formule « spectacle » et la formule « documentaire » pour le film politique : un film d’agit prop peut être un film de spectacle, on l’a bien vu à Moscou dans les années 20. (…) Mais je ne suis pas contre la formule de la fiction appliquée aux thèmes politiques. Les films documentaires sont toujours incomplets, il y a toujours des éléments qui nous échappent. Le film sur Eldridge Cleaver n’est pas réaliste du tout ; ce n’est même pas un documentaire, c’est un film abstrait parce qu’il y a beaucoup de censure volontaire : nous avons dû supprimer des choses qu’on ne pouvait pas montrer ou dire afin de ne pas fournir au FBI des éléments d’accusation contre Cleaver qui est recherché et a dû se réfugier à Alger. Cleaver est très lucide et nous avons espéré que le spectateur serait aussi lucide que lui : c’était trop espérer et c’est dans la nature du film d’agit prop de ne pas laisser au spectateur trop de latitude d’interprétation donc d’erreur ; c’est de la propagande donc, à tort ou à raison, nous pensons que c’est comme ça. Je crois que le documentaire n’a jamais été réaliste et je n’ai jamais essayé moi, d’être objectif : dans mes documentaires, et même quand je faisais de la photographie j’ai toujours pipé les dés, pour des raisons évidentes… »
William Klein in CINEMA 70 #151
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